BIENVENUE DANS LE DATATAÏSME
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Ethos, Logos, Pathos : Les trois âges pour faire société

20/7/2025

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Dans le grand récit de l'humanité, chaque époque semble avoir privilégié une manière singulière de comprendre le monde, d'agir sur lui et de convaincre. Ces modes de persuasion, ces souffles qui animent le discours collectif, trouvent un écho particulier dans les concepts antiques d'Ethos, de Logos et de Pathos. Dans mon livre Bienvenue dans le dataïsme, je propose une relecture de ces trois piliers rhétoriques, non pas comme de simples outils atemporels, mais comme les reflets des grandes transformations civilisationnelles qui nous ont menés jusqu'à l'ère actuelle, celle de la donnée reine.
L'Aube de l'Ethos : Quand la Parole Sacrée Fondait la Confiance

Aux commencements, lorsque l'homo sapiens s'éveillait à la conscience de soi et de l'autre, la question fondamentale était celle du "QUI". Qui croire pour m'expliquer le monde ? Qui suivre pour survivre et donner un sens à l'existence ? Dans ces sociétés naissantes, s'organisant autour de communautés et de traditions, la persuasion reposait essentiellement sur l'Ethos. C'était l'âge où la crédibilité de l'orateur, souvent une figure religieuse ou un gardien des coutumes, était le socle de toute vérité acceptée. La parole des prêtres, des chamans, des anciens, tirait sa force de la confiance et de la sympathie qu'ils inspiraient au sein de leur communauté de croyants. L'écriture, en figeant les récits sacrés et les lois immémoriales, devint l'outil d'extension de cet Ethos, assurant la pérennité d'un ordre où la foi en l'autorité du locuteur primait sur toute autre considération. La récompense promise était alors le salut, une transcendance au-delà du monde visible.


Le Zénith du Logos : La Raison Éclairant le Monde

Puis vint un grand basculement, celui que portèrent les Lumières. La quête de sens se déplaça du "Pourquoi" divin au "COMMENT" scientifique. Comment fonctionne l'univers ? Comment maîtriser la nature et organiser la société selon des principes rationnels ? Ce fut l'avènement du Logos, le règne de la raison, de l'argumentation logique et de la preuve empirique. Une nouvelle élite intellectuelle – philosophes, scientifiques, puis journalistes – émergea, dont le pouvoir de persuasion reposait sur la capacité à démontrer, à expliquer, à convaincre par la force du raisonnement. L'imprimerie, en démocratisant l'accès au savoir et en permettant la capitalisation des connaissances, fut le grand vecteur de ce Logos. Le citoyen était invité à adhérer à un projet collectif fondé sur le progrès, avec la promesse d'un futur meilleur éclairé par les avancées de la science et de la technique.


L'Ère du Pathos : L'Émotion au Cœur du Flux Dataïste

Aujourd'hui, comme je le développe dans Bienvenue dans le dataïsme, nous assistons à l'émergence d'un nouveau paradigme, celui de la donnée, qui semble propulser le Pathos au premier plan. La question centrale n'est plus tant le "Qui" croire, ni même le "Comment" comprendre, mais le "QUOI" ressentir, le "Quoi" me propose-t-on pour occuper ma vie et stimuler mes sens. Dans cet univers où l'information est surabondante et les algorithmes omnipotents, c'est la passion spontanée, l'émotion immédiate qui devient l'objectif et la mesure de nos interactions. Le numérique, succédant à l'imprimerie, est le formidable outil d'extension de ce Pathos, favorisant l'hyperpersonnalisation et la création de "bulles cognitives" où chacun est nourri de ce qui le touche, le conforte, le divertit. La promesse est celle de la satisfaction instantanée de nos désirs, de l'élimination de l'ennui par une stimulation émotionnelle constante. Nous vivons ce paradoxe fascinant d'une "émotion chaude comme valeur centrale de notre société en même temps que la technologie guidée par une data froide s’impose dans notre quotidien".


De l'Ethos fondateur des premières communautés à la logique éclairée du Logos humaniste, jusqu'au Pathos vibrant de notre présent dataïste, chaque époque a ainsi façonné ses propres outils de persuasion et ses propres horizons d'attente. Comprendre cette évolution, c'est peut-être se donner les moyens de naviguer avec plus de lucidité dans le monde qui vient, un monde où, plus que jamais, la manière dont nous nous lions aux informations et aux émotions qu'elles suscitent définit notre rapport à nous-mêmes et aux autres.
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L’école face au défi de l’intelligence artificielle

6/7/2025

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​Si nous entrons dans un nouveau paradigme, il est urgent que l'école puisse s'adapter pour former les enfants à un monde professionnel en transformation et les futurs citoyens à une société aux référents mouvants

 Lorsque l’IA générative est arrivée dans nos vies, le débat s’est immédiatement focalisé sur son usage ou non par les élèves. Sciences Po a commencé par l’interdire avant de faire machine arrière comme beaucoup d’autres établissements. Un débat similaire avait eu lieu vingt-cinq ans plus tôt avec la crainte que l’encyclopédie Encarta ne remplace les livres, puis que Wikipedia ne fasse fermer les bibliothèques. Si depuis cette époque, un changement a bien eu lieu dans nos façons d’apprendre grâce aux nouvelles technologies, ces outils n’ont clairement pas eu les effets escomptés pour la multitude comme le montre le 26e rang de la France au classement Pisa. Dans le tourbillon dataïste, ce n’est pas tant Wikipédia et Google qui ont affecté le niveau des élèves que l’ensemble des sollicitations numériques et l’exigence même de l’école. Alors qu’on pourrait en solliciter plus à des élèves qui ont tant de savoir à portée de clic, on en demande moins.
Il n’y a pas de raison qu’il en soit différemment avec les capacités prométhéennes de l’IA désormais capable d’effectuer un travail de recherche, de compilation et de synthèse en quelques secondes. Son usage s’est naturellement imposé sur les bancs des universités, si bien qu’en avril 2024, une étude montrait un taux d’adoption de 99% en 4ème année du Pôle Léonard de Vinci.
Chez les enseignants, l’intelligence artificielle est déjà une option pour dégager du temps dans la correction des copies et la préparation de cours adaptés à certaines typologies d’élèves. La profession fait aussi évoluer les modalités d’évaluation sur la base d’examens adaptés à la cohabitation avec l’IA.  Mais l’enjeu majeur pour l’école est de préparer nos enfants à une double réalité
 
Cohabiter avec une intelligence gratuite face à des métiers en mutation

Pour préparer au monde du travail, on devait tous apprendre à coder, mais la machine le fait déjà mieux que nous. Nous devons savoir présenter des idées mais l’IA générative s’avère également de plus en plus performante dans cet exercice.  Désormais, il ne s’agit plus seulement d’apprendre à faire, mais d’apprendre à cohabiter avec une intelligence quasi-gratuite et accessible à tous. Cette nouvelle capacité peut démultiplier les possibilités, mais elle annonce l’émergence d’une inégalité entre ceux qui sauront exploiter les algorithmes et les autres. L’école doit donc préparer les élèves à utiliser efficacement ces outils tout en conservant des enseignements de base indispensables (lire, compter et partager une culture commune). Alors comment faire de la place ? Les outils numériques apporteront sans doute une solution pour parfaire ces apprentissages, notamment en dehors de l’école.
 
Vivre en citoyen à l’ère d’une vérité sans remise en question

L’école nous a aussi appris à chercher une information parmi des sources diverses et à nous y fier. Une approche qui devient hasardeuse à mesure que les garde-fous de l’information s’effondrent. Les tenants de la post-modernité ont trouvé avec internet un écho inédit pour remettre en cause les institutions et les récits nationaux. La traduction de ce mouvement de déconstruction est désormais une porte ouverte sur un monde virtuel où avatars et fakenews s’invitent dans notre quotidien. Quel rôle alors pour une école qui préparerait à évoluer dans un monde où l’information et la vérité sont deux choses bien distinctes ? L’école a ce nouveau devoir de former à l’identification des biais cognitifs, à la validation d’une information qui permettent le développement de l’esprit critique.
 
Évitons de former des étudiants obsolètes
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Alors que l’IA projette une société dont nous avons du mal à en définir les contours, l’enseignement doit encourager les générations futures à se projeter et à trouver de nouvelles voies plus adaptées à ce monde en cours de construction. La reproduction des modèles à la base de l’école de Jules Ferry atteindra bientôt ses limites. Pour éviter de fabriquer des étudiants obsolètes, nous devons revenir à des fondements plus socratiques : apprendre à apprendre. Nos jeunes doivent entrer dans la vie professionnelle en maîtrisant le concept d’amélioration continue pour eux-mêmes. Il en va sinon de notre obsolescence à tous.
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    Docteur en sciences de l'information et de la comunication, Laurent Darmon est le Directeur de l'Innovation de l'une des dix premières banques du monde

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